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Grands événements culturels : Dérapage du budget en PACA

Marseille-capitale-europeenne-de-la-culture
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La chambre régionale des comptes de Paca épingle sérieusement la gestion de Marseille Provence 2013, dans un rapport publié le 9 juin. Les critiques ne portent pas sur un dérapage du budget, mais sur les approximations de la gestion d’un événement de cette ampleur. Pour la chambre, les difficultés d’organisation de ce type d’événement exceptionnel et les évolutions de certains projets en cours de route ne peuvent pas tout justifier.

La chambre régionale des comptes (CRC) de Provence-Alpes-Côte d’Azur publie son rapport d’observations définitives sur les comptes 2007 à 2014 de l’association Marseille Provence 2013 (MP 2013), qui a porté la candidature, puis le projet, de la cité phocéenne comme capitale européenne de la culture. Les conclusions de la CRC sont mitigées. Sans être négatives, elles mettent en évidence les difficultés inhérentes à ce type de projets multi-lieux et multi-thèmes, dont le contenu et le périmètre évoluent nécessairement au fil du temps.

Budget tenu !

Malgré ces difficultés, le budget a été correctement tenu, contrairement à d’autres grosses opérations culturelles qui ont connu des dérapages très importants, alors qu’elles semblaient pourtant mieux cadrées (musée des Confluences à Lyon, Philharmonie de Paris…). Dans le cas de MP 2013, le budget de 89 millions d’euros n’a finalement été dépassé que de 3,7 millions (4%), « en raison de la non prise en compte initiale des coûts de sortie des salariés de l’association et de l’impact de quatre projets déficitaires ». Ce budget a été financé à 65% par les collectivités territoriales, à 16% par l’Etat et l’Union européenne et à 16% par le secteur privé, le solde provenant de la billetterie et de recettes annexes.
La gouvernance s’est révélée plus complexe à maîtriser, avec la sortie rapide de l’agglomération Toulon Provence Méditerranée et le refus des agglomérations de Salon-de-Provence et d’Istres d’y participer.
Autre difficulté : les contreparties « parfois significatives » accordées aux entreprises mécènes et qui pourraient dès lors conduire à remettre en cause les reçus fiscaux qui leur ont été accordés par l’association.

Des marchés qui laissent à désirer

De même, en termes de gestion, le rapport de la CRC pointe la structuration tardive de l’équipe, notamment de direction, et le choix de recourir à des CDI pour l’équipe permanente – alors que la manifestation était par nature à durée limitée -, qui a généré des coûts de sortie non prévus.
Mais c’est sans doute en matière de marchés que le hiatus est le plus évident entre les règles des marchés publics et les particularités de la commande artistique. La CRC relève que « pour de nombreux achats, qui représentent en cumulé plusieurs millions d’euros, aucune mise en concurrence n’a été effectuée, alors que les montants en jeu nécessitaient la passation d’un marché ». Or, « la nécessité de respecter ces textes ne pouvait être ignorée par l’équipe dirigeante de l’association ».
Autre point faible : la communication de ce type d’événement. Malgré un budget conséquent (quinze millions d’euros), « la communication a été essentiellement locale, au détriment d’une stratégie nationale et internationale ». De plus, « elle a été centrée sur les manifestations alors qu’elle aurait nécessité de développer un aspect touristique et marketing afin d’accroître le rayonnement du projet dans toutes ses dimensions et de chercher à assurer une pérennisation de ses effets économiques ».

Quelles retombées pour MP 2013 ?

Reste le plus important : le contenu de Marseille 2013 et ses retombées. Si la CRC se garde de tout jugement artistique, elle relève toutefois que MP 2013 a produit ou coproduit plus de 1.000 projets. Elle considère que « leur suivi juridique et logistique a été globalement efficace et a respecté les obligations réglementaires en termes de sécurité, de fiscalité ou d’assurance ». En revanche, le rapport observe que « le mode de sélection d’une partie de la programmation par le biais d’un appel à projets a suscité de grandes insatisfactions, qui auraient pu être évitées si l’appel avait été mieux et plus restrictivement défini, notamment en termes d’enveloppes financières et de thèmes ». De même, il regrette l’absence d’un jury pour sélectionner les projets, les choix en la matière ayant été effectués par le conseil d’administration, « largement composé de représentants des collectivités locales du territoire, qui, parallèlement, présentaient elles-mêmes des projets ».
Enfin, le rapport reste prudent sur les retombées de MP 2013, même « si l’impact en termes de fréquentation des manifestations et de rénovation immobilière et urbaine apparaît positif ». Les retombées touristiques et, plus encore, sociologiques demeurent en effet difficiles à mesurer. Si l’impact sur l’image et la dynamique culturelle de la cité phocéenne semble indéniable, la CRC relève néanmoins que « l’opération MP 2013 n’a pas permis de déplacer le centre de gravité de la culture marseillaise en prenant mieux en compte les quartiers Nord et Est de la ville ».

Jean-Noël Escudié / PCA